Convergence de la méthode des éléments finis
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1. Introduction
On suppose ici que l’on résout un problème sur un domaine \(\Omega\in\RR^n\) de façon approchée par méthode d’éléments finis.
Le but de ce chapitre est de fournir une estimation de l’erreur \(\|u-u_h\|_m\) où \(\|.\|_m\) désigne la norme \(H^m\).
La régularité de \(u\) et de \(u_h\) (et donc les valeurs possibles pour \(m\)) dépendant évidemment du problème continu et du type d’éléments finis choisis pour sa résolution, on exposera ici la démarche de façon générale, en supposant les fonctions suffisamment régulières par rapport à la valeur de \(m\).
En pratique, on aura le plus souvent \(m=0, 1, 2.\) |
On notera \({\cal T}_h\) le maillage de \(\Omega\) considéré.
On supposera ici le domaine \(\Omega\) polygonal, ce qui permet de recouvrir exactement \(\Omega\) par le maillage.
Si ce n’est pas le cas, les calculs qui suivent doivent être modifiés pour tenir compte de l’écart entre le domaine couvert par le maillage et le domaine réel.
Les différentes étapes du calcul seront, de façon assez schématique, les suivantes :
L’erreur d’approximation est bornée par l’erreur d’interpolation |
\(\|u-u_h\|_m \le C \|u-\pi_h u\|_m\) |
- L’erreur d’approximation est bornée par l’erreur d’interpolation
-
\(\|u-u_h\|_m \le C \|u-\pi_h u\|_m\)
- On se ramène à des majorations locales sur chaque élément
-
\(\|u-\pi_h u\|^2_{m} = \sum_{K\in{\cal T}_h} \|u-\pi_h u\|_{m,K}^2\)
- On se ramène à l’élément de référence
-
\({\|u-\pi_h u\|_{m,K} \le C(K) \|\hat{u}-\hat{\pi}\hat{u}\|_{m,\hat{K}} }\)
- Majoration sur l’élément de référence
-
\(\|\hat{u}-\hat{\pi} \hat{u}\|_{m,\hat{K}} \le \hat{C} |\hat{u}|_{k+1,\hat{K}}\)
- Assemblage des majorations locales
-
\({\|u-\pi_h u\|_m \le C' h^{k+1-m} |u|_{k+1} }\)
2. Calcul de majoration d’erreur
2.1. Etape 1: majoration par l’erreur d’interpolation
L’équation ([eq:cea]) établie dans la section [sec:estim] indique que
Cette majoration est aussi appelée Lemme de Céa |
On peut l’appliquer dans le cas particulier où \(v_h=\pi_h u\), ce qui donne
2.2. Etape 2: Décomposition sur les éléments
On a, avec des notations évidentes :
Le calcul est donc ramené à un calcul sur chaque élément, pour toutes les semi-normes \(|.|_{l,K},\; l=0,\ldots,m\).
2.3. Etape 3: Passage à l’élément de référence
Soit \(K\) un élément quelconque de \({\cal T}_h\), et \(\hat{K}\) l’élément de référence.
Soit \(F\) la transformation affine de \(\hat{K}\) vers \(K\) :
Nous avons le corollaire suivant du théorème [thr1]
On a de même :
2.3.1. Preuve du théorème [thr1]
Ce théorème se montre comme suit. Il s’agit là en fait d’un simple résultat de changement de variable dans une intégrale.
Soit \(v\) une fonction \(l\) fois différentiable au point \(x\).
On note \(D^l v(x)\) sa dérivée \(l^{\text{\tiny ème}}\) au sens de Fréchet au point \(x\).
Il s’agit donc d’une forme \(l\)-linéaire symétrique sur \(\RR^n\).
On notera \(D^l v(x).(\xi_1,\ldots,\xi_l)\) sa valeur pour \(l\) vecteurs \(\xi_i\in\RR^n\) (\(1\le i \le l\)).
Reprenons les notations de la section [sec:sobolev].
\(\alpha=(\alpha_1,\ldots,\alpha_n)\) désigne un multi-entier, et on note \(|\alpha|=\alpha_1+\cdots+\alpha_n\). On a alors :
et
où \((e_1,\ldots,e_n)\) désigne la base canonique de \(\RR^n\).
Alors, en posant :
on déduit qu’il existe des constantes \(\gamma_1\) et \(\gamma_2\) dépendant uniquement de \(n\) et \(l\) (donc en particulier indépendantes de \(v\)) telles que
Par ailleurs, si l’on utilise le changement de variable \(x=F(\hat{x})=B\hat{x}+b\) dans \(D^l v(x)\), il vient :
d’où
Or, \(D^l v(x) = D^l v(F(\hat{x}))\). Donc
En minorant et majorant ([eq:maj2]) grâce à la (majoration), on obtient :
d’où le résultat de (majoration du théorème) ce qui conclut la preuve de [thr1] \(\blacksquare\)
2.3.2. Estimation de \(\|B\|\)
Soit \(h_K\) le diamètre de \(K\), c’est à dire le maximum des distances euclidiennes entre deux points de \(K\).
Soit \(\rho_K\) la rondeur de \(K\), c’est à dire le diamètre maximum des sphères incluses dans \(K\).
On a :
Soit \(x\) un vecteur de \(\RR^n\) tel que \(\|x\|=\hat{\rho}\).
Par définition de \(\hat{\rho}\), il existe deux points \(\hat{y}\) et \(\hat{z}\) de \(\hat{K}\) tels que \(x=\hat{y}-\hat{z}\).
Alors \(Bx=B\hat{y}-B\hat{z}=F(\hat{y})-F(\hat{z})=y-z\) avec \(y\) et \(z\) appartenant à \(K\).
Par définition de \(h_K\), \(\|y-z\| \le h_K\). Donc \(\|Bx\| \le h_K\).
En reportant dans la définition de \(\|B\|\), on obtient donc :
Et on a évidemment de même :
2.4. Etape 4: Majoration sur l’élément de référence
Le résultat principal est le suivant :
2.4.1. Preuve du théorème Théorème
On montre ce résultat comme suit:
\(\hat{\pi} \in {\cal L}(H^{k+1}(\hat{K}),H^l(\hat{K}))\), et donc \(I-\hat{\pi} \in {\cal L}(H^{k+1}(\hat{K}),H^l(\hat{K}))\) car \(l\le k+1\).
Et donc
On utilise maintenant l’invariance de \(P_k(\hat{K})\):
On aura donc démontré le théorème si l’on montre que
Soit \((f_i)_{i=0,\ldots,k}\) une base du dual de \(P_k(\hat{K})\).
D’après le théorème d’Hahn-Banach, il existe des formes linéaires continues sur \(H^{k+1}(\hat{K})\), que l’on notera encore \(f_i\), et qui prolongent les \(f_i\).
En particulier, si \(\hat{p}\in P_k(\hat{K})\) vérifie \(f_i(\hat{p})=0,\, (i=0,\ldots,k)\), alors \(\hat{p}=0\).
Nous allons montrer que
On aura le résultat souhaité en appliquant ([eqref2]) à \(\hat{v}+\hat{q}\), avec \(\hat{q}\) tel que \(f_i(\hat{q})=f_i(-\hat{v})\). |
On montre la relation ([eqref2]) par l’absurde comme suit:
Si [eqref2] n’est pas vraie, alors il existe une suite de fonctions \(\hat{v}_n\) de \(H^{k+1}(\hat{K})\) telles que :
Par complétude de \(H^{k+1}(\hat{K})\), on extrait une sous-suite convergente vers \(\hat{v} \in H^{k+1}(\hat{K})\).
Mais \(|\hat{v}_n|_{k+1,\hat{K}} \longrightarrow 0\).
Donc \(\hat{v} \in P_k(\hat{K})\) et \(f_i(\hat{v})=0\).
D’où une contradiction. \(\blacksquare\).
2.5. Etape 5: Assemblage des majorations locales
2.5.1. Majoration sur un élément quelconque
En rassemblant les résultats précédents, on peut établir une majoration sur un élément quelconque \(K\) du maillage.
On a :
D’où finalement :
Il est important de remarquer à ce niveau que \(\hat{C}\) est indépendant de \(K\). |
2.5.2. Assemblage des résultats locaux
On va maintenant reprendre la majoration ([eqmajloc]) pour tous les éléments du maillage et toutes les valeurs de \(l=0,\ldots,m\).
On va définir deux quantités représentatives du maillage :
-
\(h\quad\) tel que \(h_K \le h, \; \forall K\in {\cal T}_h\qquad\) (diamètre maximum des éléments)
-
\(\sigma\quad\) tel que \({\frac{h_K}{\rho_K}} \le \sigma, \; \forall K\in {\cal T}_h\qquad\) (caractérise l’aplatissement des éléments)
On a
Le terme entre accolades ne tend ni vers 0 ni vers l’infini quand \(h\) tend vers 0.
D’où :
En sommant ensuite sur tous les éléments du maillage :
On obtient finalement :
2.6. Résultat final
En reportant ([eqmajfinal]) dans ([eq:cea2]), on obtient le résultat final classique de majoration d’erreur :
3. Quelques commentaires
Une utilisation fréquente de ([eqmajfinal2]) a lieu dans le cas \(m=1\). Alors si l’espace de polynômes \(P_k(\hat{K})\subset H^1(\hat{K})\) (ce qui est toujours le cas) et si \(\hat{\pi}\) est bien défini sur \(H^{k+1}(\hat{K})\), on a :
Si le domaine \(\Omega\) n’est pas polygonal, la majoration précédente n’est plus valable. On peut alors établir d’autres majorations du même type – se référer par exemple à cite:[raviartthomast1983]. De même, si les calculs d’intégrales ne sont pas faits exactement mais à l’aide d’une intégration numérique, une erreur supplémentaire doit être prise en compte, qui conduit à une nouvelle majoration d’erreur – voir là-aussi par exemple cite:[raviartthomast1983]. |